mardi, décembre 20

Mardi 20 décembre- Réponse d'une étudiante affligée


Twitter. Echanger des informations en un temps record. Mais aussi des passions. Des plaisirs de lectures, des surprises, des incompréhensions totales et des mots de colère.

Je twitte et je tombe sur quelques mots d' @drmlj qui renvoie à un article qu'elle a publié sur un blog. Cet article, une réponse à un autre article, celui d'une doctorante qui, au sein d'une réponse à un questionnaire proposé par le blog l'Infusoir se permet d'écrire "Devant la dégradation constante des conditions de travail des professeurs dans le secondaire, une seule chose ne faisait aucun doute pour moi : hors de question de me retrouver devant 30 élèves de seconde qui savent à peine lire ! "


Gloups.

Je suis affligée. Et je repense à cette jeune, tout juste docteure, premier semestre de fac, qui nous dit d'un ton très sarcastique, sans prendre le temps de se remettre en question, après avoir répondu à deux trois questions lors sur son cours et après quelques réclamations d'élèves pour ralentir un peu "Eh bien, j'espère que vous avez des cours de prise de notes! Parce-que là..." Et là, une forte envie de lui répondre "J'espère que vous avez quelques cours de pédagogie! Parce-que là..."

Gloups.

Affligée de me dire qu'on peut sortir d'une thèse, temps de réflexion, temps de recherche, temps d'ouverture au monde... Et écrire de telles choses. Parce-qu'être diplômé, c'est une chose. Mais mesurer la conséquence de ses mots, surtout à l'ère d'internet, l'ère où mots et maux se croisent, se lient, se délient, s'en est une autre.

Je suis une de ces élèves qui est passée en seconde, il n'y a que quelques années. Je suis une de ces élèves issue d'un collège de zep. Et je vous l'écris, grande surprise, je savais lire en Seconde! Et j'ai découvert le plaisir de la lecture dès mes années de collèges, notamment parce-que certains de mes professeurs m'ont poussé, donné envie d'aller dévorer ces mots.
Et non, non, je n'étais pas la seule à savoir lire en seconde! Quelle surprise! D'autres élèves buvaient les mots de certains profs, d'autres élèves se questionnaient, redécouvraient le monde et ressortaient des cours en plein débats philosophiques, historiques, littéraires, débats qui pouvaient nous occuper le temps d'un déjeuner ou d'une heure de permanence! Et une majorité!

Et je suis une de ces étudiante qui certes, ne se destine pas à l'enseignement mais qui croit au partage des connaissances! Une de ses élèves bénévole qui prend deux heures de son temps par semaine pour épauler une jeune, pour l'accompagner, lui proposer un accès à la culture vers lequel elle n'irait pas forcément ou vers lequel elle n'a pas les moyens d'y aller.
Et il se trouve que cette jeune fille est en Seconde. Et "sait à peine lire" . Elle est nigérienne, arrivée il y a un an et demi en France.
Mais quelle curiosité, quelle envie d'apprendre, de découvrir et de s'investir dans ce qu'elle fait!
Quel temps elle prend pour faire au mieux.
Je suis admirative devant son courage et sa volonté d'aller de l'avant. Une jeune femme qui ne maîtrise pas forcément encore les mots mais qui pense et agit intelligemment!

Et je regarde autour de moi, je me dis que les difficultés sont là, qu'il n'y a aucun doute. Je regarde autour de moi et je souris quand je rencontre ces profs plein d'idées et de projets. Je souris quand je vois tous les étudiants qui se disent que partager est primordial.
Je souris lorsque je rencontre quelques jeunes qui ne dévorent ni Balzac ni Maupassant mais qui vous disent qu'ils sont allés au Japon avec leur équipe de foot et que c'était vraiment bien de voir comment c'était là bas!
Je souris quand je vois des jeunes passer leur Bafa,  comme moi. Ils n'ont pas forcément de diplômes particuliers,  ils ne sont pas forcément étudiants. Quelques fois ils n'ont pas le BAC mais ils sont là, attentifs aux enfants, ils savent leur métier en tant qu'animateur et savent l'importance des valeurs à inculquer à ces enfants qu'on nous confie.
Et je distingue tant d'intelligence dans leur faits et gestes, dans leur manière d'être.

Les valeurs, peut-être est-ce le centre de la question. Quelle valeur doit-on avoir pour écrire de telles phrases sur un blog accessible à tous? Qu'enseigne t-on et que partage t-on avec les lecteurs?
"L'élite". Bravo. La France vous est très reconnaissante de votre brillance et de votre investissement dans vos études et vos recherches.
Nous sommes fiers de vous compter parmi nos concitoyens.
Faire des études est une chose. Etre le meilleur est une chose. Mais à quel prix? Au prix de ne pas se rendre compte qu'à l'extérieur de la prépa, il y a une réalité à laquelle on va devoir être confronté d'ici peu. Au prix d'arriver dans une université et de s'enfermer dans un Labo pour faire des recherches plus intelligentes les unes que les autres, d'écrire une thèse et de devenir docteur sans ce soucier un seul instant de ce qui peut se passer à l'extérieur?!
Et face aux étudiants. Que fait-on une fois qu'arrive le moment d'effleurer du bout des doigt quelques heures de réalité de la semaine?
Eh bien voilà, me semble t-il un exemple typique: on se protège et l'on se réfugie dans des mots à consonance un peu compliquée et qui font très intelligent pour répéter des absurdités. On regarde tout ces petits merdeux de haut. "Qui sont-ils après tout? Qu'ont-ils fait? Moi, j'ai une thèse!"
L'on se réfugie derrière des phrases toutes faites, entendues et trop répétées, incapable de faire face à une réalité qui peut paraître si difficile.
Je trouve cela si triste.

Et ce sont des phrases comme celles-ci qui me confortent dans les choix que j'ai pu faire jusqu'ici. C'est prouvé, "l'Elite" ne conduit certainement pas à l'Intelligence!

K.




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