dimanche, mars 8

Chapitre 4. Se laisser porter par la mer.

Samedi.

Je me réveille en souriant. Mais je pense aussi que demain je pars. Elle n’est plus dans la chambre. Elle a un peu travaillé, dans la cuisine. Aujourd’hui on va à la mer. Une sortie est justement organisée pour les internationaux. On se dit qu’on ira avec eux. Mais avant, elle m’a dit qu’on allait manger au « Queen of tarts » … Je vais me doucher.
On part, un peu plus tard que prévu aujourd’hui. Tant pis. On prend notre temps.
Le restaurant est fabuleux !
Qu’est-ce que c’est bon. « Je crois que je reviendrais en Irlande rien que pour y retourner ! » je lui dis en riant.
Les tartes sont délicieuses et les desserts…N’en parlons pas !
Après un « lunch » digne de ce nom », il est trop tard pour rattraper les autres pour aller à la mer. On y va seules.
On prends le « dart », c’est le RER irlandais. Je regarde les stations défilées. C’est drôle, ici je fais attention à ces panneaux qui sont les mêmes mais qui changent parce que derrière, c’est différent. Je n’avais jamais pris le temps de regarder dans le RER parisien…
Quand on arrive, on voit la mer à travers la vitre. On descend et puis elle me demande si je veux aller sur la jetée ou si je veux faire une ballade.
On est partie pour la ballade. Au départ, il y a un mur, on longe la voie ferrée. On ne peut pas voir la mer. Elle me dit qu’on aurait du descendre plus tôt.
C’est pas grave. Une drôle d’ambiance. Le chemin étroit, enfermé entre un grillage derrière lequel on voit la voie ferrée et un mur, cela fait bizarre.
On arrive à la mer. C’est beau.
Il y a des enfants qui jouent au bord de l’eau. On s’assied sur un muret. Je sors mes cartes postales pour les écrire. « Coucou les filles … »/ « Alice , … » / « Sylvia, … »/ « Mes parents… »…
La mer en face de moi s’étend, bleue, grande. Le ciel ne s’y confond pas. Enfin si, mais qu’à un seul endroit, le seul endroit où il n’y a pas de terre, au bout. Le seul endroit où mes yeux peuvent se perdre dans l’horizon.
On reste encore un peu puis on se lève. On va prendre le bus pour rentrer.
On se perds. Elle est embêtée, n’a pas sa carte, moi je ris, qu’est-ce que c’est ien de se perdre en Irlande, avec elle. Finalement, on attend un bus qui nous emmènera en ville. On s’arrêtera à « L’écrivain » pour enfin savoir ce qu’est ce mystérieux nom français perdu en plein Dublin, pour savoir ce qu’il y a ou pas derrière cette pancarte devant laquelle on passe sans cesse sans prendre le temps de s’y arrêter, parce que le bus va trop vite.
A l’arrêt de bus, un homme, la soixantaine attend avec nous. Elle lui laisse sa place lorsqu’il arrive. « You’re both beautiful girl ». Au départ, ça nous fait rire. On dit « Thanks ». Puis il continue à parler, on y comprend rien. Il ne parle pas assez fort, autour il y a trop de bruit et en plus, il a un accent irlandais marqué…
Je suis la plus près. Je comprends que les femmes d’où il vient doivent porter des vêtements très chauds parce qu’il fait froid, il nous demande si nous on a pas froid. Et puis, il répète au moins cinq fois « you’re both beautiful girl ». On a compris on se murmure en souriant, entre les dents. On fait mine d’être française et de ne pas comprendre ce qu’il dit. Il parle ensuite des femmes de paris, qu’il a vu danser dans les cabarets en France.
On attend le bus avec impatience. Au bout d’un moment, il se tait, nous on essaie de parler d’autres choses pour qu’il n’ose pas nous interrompre.
Au bout de trois quart d’heure, une heure, le bus arrive. On va à l’étage. L’homme reste en bas. On rie. LE bus va vite. Elle n’est jamais passer par là, on se demande où l’on doit s’arrêter. Finalement, on a raté notre arrêt, le bus arrive à son terminus. On descend. Emme est déçue. On va pour attendre un autre bus qui nous déposera au campus. Cette fois on prend le premier qui arrive même si on doit marcher un peu plus là bas. On ne veut pas attendre trop longtemps. On finit par arriver. On rie tant on est fatiguées de marcher, ébahie par les rues de Dublin, ailleurs. Avant de rentrer, on passe à l’épicerie du campus, il n’y a plus de papiers toilettes, ni de céréales. J’achète de l’Hagëndaz pour lui faire plaisir.
Lorsqu’on rentre et que je veux mettre la glace au freezer, il est bloqué. Je crois que j’essaie de le débloque pendant vingt minutes, et puis j’arrête ; Je mets la glace au frigo.
Dans sa chambre, on s’installe toutes les deux. Elle, sur son ordinateur, moi, avec un livre de Valentine Goby dont j’ai appris qu’elle interviendrait dans notre stage autour de l’image documentaire. Je lis. Des décénies que je n’avais pas ouvert un livre pour moi, parce que j’avais envie de lire. Je laisse Ponge et Le parti pris des choses , et j’ouvre L’échappée. Je me laisse portée par les mots. Au début, j’ai peur. J’ai du mal à retrouver un rythme, à me concentrer. Et puis ça revient, tout naturellement, je me laisse emporter. Elle s’allonge un peu à côté de moi. Elle est fatiguée.
Au bout d’un moment, on va préparer à manger. Ce soir, M. vient et on va regarder un film.
Lorsqu’elle arrive, on sourit. On ne tarde pas à mettre le film. La vie des autres. Avant que ça commence, je prends une série de photos des filles et des lanternes qui viennent de laos et qui sont accrochées au mur.
M. a apporté des cookies au beurre de cacahouètes. Délicieux.
On regarde le film en VO sous-titré anglais. Encore une fois j’ai peur de ne pas suivre puis, finalement, ça va tous seul.
Lorsqu’il est fini, un peu de silence.
Après le film, des discussions de tout. Elle est sur l’ordi. M. et moi on discute le monde.
M. doit partir, elle a encore de la route avant d’être chez elle. Avant de dormir, je reprends mon carnet, j’écris. Puis je lis un peu. Je me perds dans les mots.
J’éteins la lumière, contente de la soirée, contente du voyage, contente de tout.
Je ferme les yeux.

Aucun commentaire: